La Poste a entamé cette année une réorganisation d’ampleur de la distribution postale un peu partout en France. Et elle ne se fait pas sans heurt: le courrier a du mal à être acheminé et dans certains centres, des dizaines de milliers de lettres sont en attente.
Cette année, les lettres adressées au Père Noël risquent de lui arriver trop tard. Par contre, les cadeaux seront à l’heure. C’est la conséquence des réorganisations régionales des tournées de distribution du courrier.
Dès le mois d’octobre, les horaires de travail des postiers, leur mission et l’ouverture de certains bureaux de postes ont été modifiés. Principal bouleversement: la baisse du nombre des tournées pour s’adapter à la chute de l’envoi des lettres et à l’augmentation des colis commandés en ligne. Une réorganisation qui n’est pas sans conséquence… Dans les zones où elle est désormais mise en place, la tournée du facteur est plus longue, et sa journée s’arrête vers 16 heures, coupée par une pause déjeuner. Résultat: le courrier peut maintenant être distribué dans l’après-midi, si le facteur passe bien dans votre rue.
Pour la CGT, la direction de La Poste fait maintenant le choix de distribuer en priorité les colis, au détriment des courriers.
« Cette organisation provoque des retards de courriers qui s’accumulent plusieurs semaines à la distribution, car désormais les colis sont prioritaires », nous a signalé Pascal Le Lausque, facteur et responsable CGT Fapt (courrier/colis) en précisant qu’en plus, « la réduction du nombre de tournée ne permet pas de distribuer la totalité du courrier ».
Désormais, certaines lettres, même officielles, mettent plusieurs jours à être acheminées. « S’il n’y a pas de colis à distribuer dans une rue, la distribution peut être repoussée au lendemain, ou au surlendemain », réagir Pascal Le Lausque. Interpellée sur ce point, la direction du Finistère rappelle que « La Poste n’est pas tenue à des obligations d’horaires de passage de ses facteurs ». Elle admet néanmoins « quelques difficultés sur certains points de remise ». Le groupe la Poste rappelle aussi que « 72.000 facteurs distribuent le courrier et les colis partout en France 6 jours sur 7 et rendent de plus en plus de services aux entreprises, aux collectivités et aux particuliers ».
60.000 courriers en attente à Vincennes-Saint-Mandé depuis août
En effet, un peu partout, la presse locale rapporte des dysfonctionnements qui pénalisent les habitants. La Montagne signale des « retards importants » à Montluçon où, selon la CGT-FAPT 03 et l’UNSA-Postes Allier, « au 30 octobre, 30.000 plis n’avaient pas encore été distribués ». Parmi ces courriers, des lettres prioritaires comme en témoigne le greffier du tribunal de commerce. « Cette lettre prioritaire est partie le 21 octobre. Je l’ai reçue le 4 novembre. […] Ca devient préjudiciable, pour certaines procédures ».
« À Quimper (Finistère), certaines boîtes aux lettres restent désespérément vides depuis dix, voire quinze jours. Pas une lettre, pas même une facture… », signale Ouest France. A Penhars, dans le Finistère, une habitante explique au Télégramme qu’elle ne reçoit « quasiment plus de courrier ».
Protestant contre cette réorganisation, certains postiers se sont mis en grève. Résultat: dans certaines régions, les plis s’accumulent encore plus dans les centre de tri. Ainsi, à Saint-Yrieix-la-Perche (Haute Vienne), les postiers se sont mis en grève illimitée contre la suppression de deux tournées, explique Le Populaire du Centre. En Corse, 52% du personnel du centre courrier de Bastia Cap est également en grève. « Les courriers s’empilent et le conflit social s’allonge », note Corse Matin. Des mouvements sont aussi en cours dans des bureaux de postes ou des centres de tri en en Alsace, en Isère et en Rhône Alpes. L’Île-de-France n’est pas épargnée avec un mouvement de grève à Versailles et une accumulation de 60.000 courriers non distribués dont certains depuis août à Vincennes-Saint-Mandé, selon Le Parisien.
Le courrier s’invite à la grève du 5 décembre
A la diversité des problèmes locaux le Groupe La Poste répond avec un même argument. Cette nouvelle organisation vise à « accompagner la baisse des volumes du courrier mais aussi la croissance des achats de marchandises en ligne et le déploiement de ses nouveaux services ». Une porte parole nous a précisé qu’il « il ne s’agit pas d’une réorganisation nationale, mais d’ajustements et d’évolutions locaux réguliers ».
Chaque région s’appuie sur les mêmes chiffres, ceux d’une étude de l’Arcep qui observait « la contraction du volume total d’objets s’amplifie nettement en 2018 (-7,7% en un an), après quatre années autour de -5% par an ». Les seuls objets épargnés sont les colis domestiques, import et export, « dont la croissance reste élevée pour la quatrième année consécutive ».
Malgré tout, les discussions avancent entre les représentants des postiers et les directions régionales qui acceptent des aménagements sans remettre en cause cette réorganisation. Dans certaines régions, les syndicats ont obtenu « la transformation de précaires en CDI, des aménagements des horaires et même des primes dans certains cas », nous a dévoilé Pascal Le Lausque.